Paru aux éditions Sans Escale avec Sept notes d’accompagnement de Jean-Pierre Otte
samedi 4 janvier 2025 par Françoise Urban-MenningerPour imprimer
Dans l’une de ses "Sept notes d’accompagnement", Jean-Pierre Otte nous prévient : "Les poèmes de Valéry Molet sont traversés de ruées sensuelles. L’aventure est physique dans un excès de réel", au lecteur donc de démêler dans cette alchimie poétique la part du spirituel de celle du matériel.
Pour Merleau-Ponty "la chair, c’est le corps animé", pour Valéry Molet, c’est le texte qui se fait corps et prend chair dans ses écrits. L’amour, la mer, la mort rythment le flux et le reflux de ces pages dont le tempo a partie liée avec les plaisirs de la chair, "Car dans l’amour, il y a l’être et le faire." Et au paroxysme de l’extase où le faire se confond avec l’être, Valéry Molet de confier dans un vers à la fois dithyrambique et mortifère "Ta beauté a défait la mer qui n’est plus qu’un cadavre ;"
Et toujours, la mer recommencée, de faire écho à celle de Paul Valéry dans le cimetière marin de Sète, poète qu’il cite en exergue de son recueil : "Il y a des coexistences merveilleuses que l’on peut comparer à des accords dissonants, qu’enrichissent encore des différences savoureuses de timbres."
Les dissonances dans ce livre en sont-elles vraiment, au sens où elles seraient ce qu’on appelle des fausses notes ? Quand l’auteur évoque l’ascenseur rouge de la tour Eiffel qui monte "Comme s’avance le sperme/ Dans la cavité utérine" ou encore personnifie la Seine qu’il compare à "un torrent de foutre", c’est le corps qui parle sans le filtre du paraître et de l’hypocrite morale convenue. On retrouve alors l’auteur des Injures précédent un amour légendaire, maître de l’autodérision, de l’ironie et du cynisme invétéré. Mais la mer toujours recommencée, revient dans le texte telle la femme aimée, elles se fondent et se confondent dans la même chair des mots "Ta bouche et le bonheur forment un seul verbe."
Mais au Havre, Valéry Molet de confier "J’ai peur à tes côtés que la lumière s’époumone", l’ombre de la mort se profile derrière les mots et d’écrire à Dunkerque "La peur de la mort,/ Dont tes rêves au matin s’empiffrent,/ Disjoint tes joies forbannes."
Et voilà le lecteur appréhendant L’extrême limite de la nuit dans ce livre qui nous mène de l’autre côté des mots où le miroir brisé de la vie, qui nous fait et nous défait, recompose à l’aune de notre mort cette magnificence qui fait danser notre être dans ce qu’il nous reste de corps et d’esprit sur la corde jours "Car l’amour a son tempo de neige/ Et de rougeur aux joues.", et dans le poème Ivre ou pas, Valéry Molet de nous donner l’une des clés de son écriture inclassable "La poésie forme un drôle de cirque."
Françoise Urban-Menninger
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