dimanche 16 juin 2024 par Jean-François Ponge
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Gallimard (collection Folio), 2001, 302 pp.
Une plongée dans les aléas de l’action humanitaire, dès lors qu’elle devient un enjeu politique qui la dépasse. Jean-Christophe Rufin, avec sa maestria habituelle, nous conte les gloires et déboires de Grégoire, vingt-sept ans, chargé de mettre sur pied à Asmara, aujourd’hui capitale de l’Érythrée, une mission humanitaire destinée à accueillir les milliers d’Éthiopiens victimes d’une terrible famine. Nous sommes sous la dictature "communiste" de Mengistu, aux prises avec un effondrement total de l’économie du pays et incapable de faire face à la situation. L’occasion est trop bonne pour profiter de l’aide internationale, que la junte au pouvoir destine en réalité à financer la déportation massive de la population. Croyant maîtriser la situation, avec l’aide d’un ancien marchand d’armes devenu son mentor, Grégoire va se trouver pris en otage dans une sombre machination qui va voir s’effondrer tous ses espoirs. Ce roman, avec ses personnages attachants, jamais tout noirs ni tout blancs, et ses multiples péripéties, se lit comme un polar politique alors qu’il s’agit d’un pamphlet acerbe, basé sur l’expérience personnelle de l’auteur et des sources très sérieuses, citées en fin d’ouvrage. On ne ressort pas indemne de sa lecture, même si l’actualité a fait depuis son chemin et largement redistribué les cartes dans cette partie de la corne de l’Afrique. Au travers de la narration d’Hilarion Grigorian, l’ex-marchand d’armes, c’est toute la complexité du comportement humain, partagé entre de multiples ressorts souvent contradictoires, qui nous est dévoilée, atteignant à l’universel.
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