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Fissions - Romain Verger
mardi 8 octobre 2013 par penvins

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Le Vampire Actif, mai 2013 12,50 €

D’un roman de Romain Verger, on ne sort pas indemne. Celui-ci, qui peut sembler à première vue, n’être qu’un exercice de style, une brillante composition, se révèle, tout au contraire, riche d’une monstrueuse culpabilité que le texte tente d’extirper. Les bouches seront écartées au-delà du possible pour que s’avouent les crimes, se dise ce qui se cachait dans la nuit. Nuit de noces pénétrée de cris insupportables, de révélations devenues indispensables. Bien sûr, il y a la grande maîtrise avec laquelle l’écrivain ordonne son imaginaire, mais il y a surtout cette lente descente aux enfers pour libérer dans la douleur ce qui ne peut être exprimé autrement.
Les morts succéderont aux morts, chaque crime se doit d’être puni, le narrateur se sent responsable de chacun d’eux et les revendique.

Il ne peut y avoir de légèreté sans la fraternité des aveux, longue traversée de la nuit en compagnie d’Henri Michaux cité en exergue :
Je me suis uni à la nuit
A la nuit sans limites
A la nuit

De cet enfer finalement l’auteur espère échapper en laissant ses bourreaux lui fouiller les entrailles :
j’ai vu l’oncle Bruce percer la nuit […] et j’ai senti qu’il dénouait quelque chose
Alors seulement, pourra s’écrire la dernière phrase du texte :
Et nous ne pesions rien, plus rien, soulevés et fouettés par l’amour tous quatre frère et sœurs.

Épreuve terrible que de fouiller dans toute cette merde, le héros travaille dans une déchetterie et extrait de la fosse, à l’aide d’un bras métallique, les plus gros déchets. L’auteur nous prévient : Quand je fouillais là-dedans, c’était en moi-même que je remuais […] En lui-même qu’il retrouve Gaël pour lequel, Marie, son premier amour, l’avait quitté ? Le travail est tel que : De retour à la maison je n’avais pas la moindre envie d’écrire. Remarque en passant et qui pourtant souligne la douleur d’accoucher de ce roman.

Le héros est enfermé dans sa folie et prêt à purger [ses]crimes en prison […] pourvu qu’on [le] sorte de là, l’arrache de ce séjour parmi les fous, à ces murs parmi lesquels l’humanité s’épuise en obsession du sexe et de la nourriture. Manière de nous renvoyer à notre propre folie et l’on sait qu’il ne s’en sortira que par le partage des mots en allant chercher loin à l’intérieur des entrailles. Les mots, le style, mais aussi l’intime au fond duquel plonge le bras de Bruce, pas seulement la nourriture et le sexe, aussi cette parole que Noëline refuse à son mari, cette bouche qu’il faudra lui ouvrir, défloraison de cette bouche virginale.
[…] cette obscure part de son corps où le mal s’enracinait.

De dire, d’écrire aura permis d’évoquer Marie, d’obliger Noëline à tuer le bouc et d’ouvrir les bouches au-delà du possible. Il nous restera un texte magnifique dont évidemment seul l’auteur connaît les sources et que l’on prend plaisir à visiter et à revisiter y découvrant à chaque lecture de nouveaux échos.



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