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Regard n° 116 - Gilles Briaud
jeudi 12 juillet 2012 par Jean-Paul Gavard-Perret

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GILLES BRIAUD : LES SANGLOTS ARDENTS

« Gilles Briaud », Regard, n° 116, Juin 2012. Texte de Ivan P. Nikine.

D’une de ses mains Gilles Briaud tend le miroir de la nudité, de l’autre il le fait trembler. Le désir ou l’angoisse défait l’apparence. Il montre celui (ou celle) qu’on refuse de reconnaître : celui que l’on a cru voir et qui n’était pas sûr d’être lui-même. La peinture rapproche de l’inconnu, atteint son énigme. Afin de rendre évidente toute ressemblance l’artiste traverse ce miroir. La peinture devient le miroir brisé du simulacre.

L’érotisme d’une telle peinture - car érotisme il y a - s’élève contre tout effet de simplification entre désir et angoisse là où tout n’est pas donné à voir. La douleur, le plaisir donc l’amour (quelle qu’en soit la nature) n’en deviennent que plus cuisants tant par les poses, les bribes de couleurs et les mises en scène.

La constante nudité offerte crée une autre "étendue". L’œil s’éprend du corps certes. Mais le regard n’en vient pas à bout. Les peintures de Gilles Briaud font de chaque œuvre un volontaire inaccomplissement, un contre-chant par l’intensité voulue mais retenue et le rythme des formes afin de créer des variations. Elles participent au monde rêvé ou au monde craint : à celui des rêves comme des cauchemars.

Le corps qui emporte le regard n’est plus celui de la béatitude exaltante. Un rien italien ( de la renaissance) le corps féminin ou nubile apprend à se méfier de sa propre séduction. C’est plus par une vue de l’esprit que par la simple perception que l’artiste le suggère. Le « réalisme » ou plutôt la figuration rapproche inconsciemment d’un souffle de l’origine, de la « nuit sexuelle » qui tente de se respirer par ce qui est suggéré.

Surgit un sentiment paradoxal à la vision de l’œuvre : nous échappons au corps tout en n’étant rien sans lui. Il est notre rien d’autre. Son impossible approche (à l’inverse des personnages qui n’ont cesse d’être ici en fusion) atteste parfois des « sanglots ardents » dont parlait Baudelaire.

Dès lors un lien existe entre le sujet vu et celui qui le regarde. Mais cette connexion ne se prête pas à une lecture immédiate. L’artiste par sa technique ménage des errements ou des « oublis », des intransigeances ou des omissions. Le corps est sans doute désirable mais devient ce dont Barthes rêvait pour l’art du nu. En lui le désir a nécessairement un objet mais il convient à un artiste de ne pas le réduire à un objet de fantasme.

Cela n’est pas simple. Toutefois Gilles Briaud réussit à trouver une sidération insécable de la désideration. La nudité offerte n’est pas consommable. Elle devient le miroir brisé du simulacre. Elle est la vision remisée et l’aveu contrarié. Plus besoin de lui tourner le dos : comme un fantôme la nudité elle-même gagne sa fuite.

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