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Courtyards and Symmetric Settlements - Clay Ketter
jeudi 19 janvier 2012 par Jean-Paul Gavard-Perret

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LES ASCENDANCES AMBIGUËS DE CLAY KETTER

Clay Ketter, « Courtyards and Symmetric Settlements », Galerie Daniel Templon, 23 février - 7 avril 2012, Galerie Daniel Templon.

Clay Ketter se situe dans la lignée de la peinture abstraite américaine qu’il entraîne vers de nouvelles voies. Celui qui s’est fait connaître dans la dernière décennie du XXème siècle par ses hybridations constituées de peintures, photographies et de divers matériaux de construction continue de présenter des œuvres certes différentes de celles de ses débuts mais dans le même esprit. « Courtyards and Symmetric Settlements » proposent des surfaces abstraites (même si elles gardent comme base une forme de réalité) et d’une planéité particulière qui ne sont pas sans devenirs parfois des références poétiques ou ironiques à une forme de modernisme.

Dans ses œuvres surgissent des espaces étranges qui sortent autant des registres de l’abstraction et de la figuration. Les « Symetric Settlements » sont construits à partir d’images satellites de lotissements américains en particulier de ses ensembles construits pour les seniors afin de les protéger du dehors comme on en trouve plus particulièrement au Texas et en Californie même s’ils essaiment partout aux Usa et ont traversé l’Atlantique.

Ces vues aériennes manipulées et dupliquées par l’artiste créent des motifs géométriques et symétriques. Ils ne sont pas sans rappeler le jardin à la Française (« Spider Woods », 2010). Clay Ketter affectionne ces formes qui pour lui symbolisent sinon un délire du moins un désir disproportionné de perfection et de sécurité. L’artiste propose aussi par ces « vues » une critique de communautés introverties qui à force de protection finissent par s’isoler de tout.

Les « Courtyards » répondent à une nécessité un peu différente quoique parallèle. Ce sont des collages recouverts en résine polie. L’artiste par cette technique crée une platitude sans la nécessité de la peindre. Mais il répond de la sorte à ce que disait Bram Van Velde : " Ce que j’aime dans la peinture c’est que c’est plat ».

Sur les plans créés par Ketter surgissent des blocs qui pourraient ressembler à ceux d’immeubles. Là encore l’impression prédominante reste celle d’un enfermement et de finitude en dépit du caractère « abstrait » que peuvent prendre de telles œuvres. On peut alors se demander ce que marque la frontière de chaque pièce. On peut y éprouver une forme de sérénité envers un espace limité et fini mais on peut y ressentir une forme d’étouffement programmé.

Ce travail n’offre pas de réponse. Ne cherchant jamais des effets de chaleur ou de lumière, l’artiste continue comme avec ses œuvres antérieures à jouer avant tout sur les phénomènes de structures qui parcellisent l’espace.

L’espace devient autant une châsse, réceptacle d’un désir sans visage pour des yeux pleins de secrets. Tout est affaire de divisions, de morcellements dans le jeu de l’étroitesse et de l’éloignement par effets de surface qui demeure énigmatique.

Certains y découvriront des routes qui ne mènent nulle part. D’autres seront saisis par la présence d’un Éden proche d’un cauchemar (« The Garden Revisited ») dans son système scellé sur la répétition.

Toutefois Clay Ketter repousse les effets de mélancolie ou d’effroi même si chacune de ses œuvres semble indiquer un point de non-retour. Le spectateur semble plongé autant dans qu’en dehors de l’espace. Dans la vastitude et le minuscule au moment où la peinture (ou ce qui lui ressemble) abstraite s’ouvre à des possibilités nouvelles de type « impressionnistes ». L’œuvre à cheval entre utopie artistique et artisanat devient autant une méditation sociologique et existentielle qu’une réflexion sur l’art lui-même ses dessins, ses coloris, ses techniques.

Fidèle à son dessein Clay Ketter tend à produire un lieu qui agrège et désagrège. Pas de certitude. Pas de symbole. L’art se mesure à ce qu’il est : l’ébranlement de la pensée par les structures et leurs déstructurations au sein d’un art aussi libre, savant qu’artisanal. Il réapprend une fois de plus comment les brebis affamées et apeurées que sont les hommes ne broutent que l’ombre de leur ombre.

CLAY KETTER : CONTENANCES

Né en 1961 aux États-Unis, Clay Ketter vit et travaille depuis une dizaine d’années en Suède. Il est représenté par la galerie Daniel Templon à Paris et avec les galeries Sonnabendà New York et White Culbe à Londres. Dans ses œuvres surgissent des espaces étranges qui sortent autant des registres de l’abstraction et de la figuration. Ce travail parle sans jamais de réponse si ce n’est au néant. Ne cherchant jamais les effets de chaleur ou de lumière, l’artiste joue avant tout sur le jeu des structures qui parcellisent l’espace. La langue picturale reste aux aguets derrière ses pans qui parfois semblent vouloir se superposer.

L’espace se fait donc châsse afin de contenir une sorte de désir sans visage pour des yeux pleins de secrets. L’épaisseur est le vide que la couleur (fût—ce le blanc) divise. Il se fend là où l’étroitesse rejoint les effets de surface et où le regard percute une forme d’impossibilité de voyeurisme. Clay Ketter repousse tout effet de mélancolie et d’effroi dans une approche qui devient un point de non-retour.

Hors espace mais dans sa vastitude et à l’écart des effets de représentation Clay Ketter projette loin des réactions émotives. Des possibilités nouvelles de type « impressionnistes » s’inscrivent par la force de la structure et des couleurs. L’artiste médite en acte sur l’essentiel de la peinture là où à la colore s’impose le disegno. Le jeu des surfaces brise l’espace géométrique classique et cherche à désobstruer la couleur des volumes pour préparer l’art à une autre fin que la mimesis.

Surgit une atmosphère de liberté retrouvée. D’interrogation aussi. Au lieu d’aboutir à des formes dont la perfection séparerait le flux Clay Ketter tend toujours à produire un lieu qui agrège et désagrège par des présences simples et diffuses, une présence qui vaque. Pas de certitude. Pas de symbole. L’art se mesure à ce qu’il est : l’ébranlement de la pensée par les structures et leurs déstructurations au sein d’un art aussi libre, savant et inflexible. Il apprend l’essentiel. A savoir que comme des brebis affamées les hommes ne broutent que leur ombre.

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