vendredi 16 avril 2010 par Nadia Bouziane
L’homme de tout temps a toujours été mû par le désir de découvrir d’autres contrées, d’autres hommes et de témoigner de ce qu’il a vu. Ce qui fait que les récits de voyage et la littérature de voyage ont constitué un genre littéraire important qui interpelle. Les sédentaires et les « casaniers » ont besoin de rêver et sont curieux du mode de vie et de la culture des autres.
Le désir de témoigner et la curiosité des potentiels lecteurs auxquels s’adresse le récit de voyage pousse l’écrivain voyageur ou le voyageur écrivain à être minutieux dans la description de l’ailleurs différent et de l’autre réel étrange ou exotique. Il transmet des émotions, des angoisses, une façon d’appréhender la réalité, ceci fait faire au lecteur un double voyage : le voyage dans une contrée lointaine et un voyage intérieur pour découvrir un voyageur, et c’est ainsi que le lecteur s’engage dans l’aventure. Il y a comme un contrat tacite entre l’écrivain voyageur et ce lecteur qui demande des récits palpitants de conquêtes, de découvertes et d’explorations de pays lointains géographiquement et qu’il ne pourra jamais visiter.
Au début le voyage était une entreprise dangereuse et onéreuse. Rares étaient ceux qui courraient le risque de s’engager dans ce genre d’aventures. Si le premier « récit de tourisme » est l’œuvre de Pétrarque en 1336, quand il décrit son ascension du Mont Ventoux , l’ascension n’avait d’autre but que celui d’éprouver une sensation forte et le plaisir de faire quelque chose que les autres n’avaient pas l’habitude de faire. Cette montée du Mont Ventoux est comparée à une élévation au dessus de tous les « mortels » et aux progrès que l’homme est tenu de faire dans sa vie. Pétrarque a même reproché à ses compagnons de voyage qui n’avaient pas voulu escalader la montagne avec lui leur « frigida incuriositas ».L’absence de curiosité ne permet pas à l’homme de vivre pleinement selon Pétrarque.
Avec le progrès technique, les voyages sont devenus plus faciles donc les récits de ces voyages vont se multiplier surtout avec deux faits importants, la découverte du nouveau monde et toutes les convoitises que cela suscite, et l’invention de l’imprimerie. Le prix du papier étant devenu abordable, le livre alors devient une marchandise accessible à toutes les bourses.
Le XIXème siècle a vu le foisonnement des récits de voyages, pour une double raison, d’un côté nous avons l’expansion des conquêtes coloniales européennes, d’un autre côté, les intellectuels et les journalistes peuvent désormais vivre de leur plume et la littérature de jeunesse à l’époque puise ses thèmes dans les récits de voyages.
L’attrait des lecteurs pour la littérature de voyage a poussé certains écrivains à publier des récits de voyages imaginaires, ainsi Jean de Mandeville s’inspirant des carnets de voyage de Marco Polo a écrit un récit qu’il a intitulé Livre des merveilles du monde, il a réussi à berner tout le monde avant qu’on ne découvre que le voyage en Chine dont il parle n’est que le fruit de son imagination.
Savinien de Cyrano de Bergerac dans L’Histoire comique des Estats et Empires de la lune et Histoire comique des Estats et empire du Soleil donne un admirable récit de voyages imaginaires et fantastiques.
Robinson Crusoé de Daniel Defoe et Les Voyages de Gulliver de Jonathan Swift relèvent aussi des récits de voyages imaginaires destinés à un lectorat avide d’aventure.