Premier amour, Joyce Carol Oates

 

Dans ce court conte gothique, il est question de la relation entre une petite fille de onze ans et un séminariste neurasthénique et pervers. Joyce Carol Oates y explore habilement et finement les méandres nauséeux de l’inceste. Le texte, hanté par une symbolique libidineuse et obscure – une poupée décapitée, un serpent noir effleurant un christ, un faucon prêt à fondre sur ses proies humaines –, est bâti sur de déroutants et inquiétants non-dits. On ressent toutefois la violence des actes sexuels subis par une fillette embarquée contre son gré dans une relation obscène.

 

Josie et sa mère vont vivre quelques mois chez une grand-tante à Ransomville (Etat de New York), après avoir dû quitter précipitamment le domicile conjugal. La fillette y fait la connaissance de Jared, un cousin âgé de 25 ans, descendant d’une longue lignée de pasteurs presbytériens. Froid et mystérieux, Jared exerce sur Josie un pouvoir d’attraction malsain. Un jour, elle le rencontre, ombre blanche et intrigante, au bord de la rivière Cassadaga... La jeune fille, oscillant entre terreur et amour, découvre les rivages dangereux et immoraux de l’inceste et du sado masochisme. Sa mère, qui passe son temps à courir les hommes et à tenter de faire carrière, ne voit pas le drame qui se produit sous ses yeux. Livrée à elle-même, Josie est contrainte de garder secret ses aventures avec Jared.

 

Une fois l’ouvrage refermé, on reste abasourdi par l’effrayante détresse d’une fillette qui, abandonnée par les siens, n’est pas en mesure de juger ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas…

 

Florent Cosandey, 12 décembre 2006