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L’Arsenal N°5
mercredi 30 mars 2011 par penvins

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Entretien avec Lionel-Edouard Martin à l’occasion de la sortie du numéro 5 de la revue L’Arsenal

Entretien avec Lionel-Edouard Martin à l’occasion de la sortie du numéro 5 de la revue L’Arsenal.

 

1 - Lionel-Edouard Martin, la revue l'Arsenal sort son numéro 5 dont vous êtes le directeur de la publication, cette revue se définit comme écartant la critique pour s'intéresser aux seules influences déterminantes de la matière brute, pouvez-vous malgré tout tenter de nous dire ce qui caractérise ces textes et ces auteurs ?

L’idée fondatrice de L’Arsenal, c’est de revenir aux textes, dépouillés de ce qui fréquemment les entoure dans les revues littéraires actuelles : pas de critique, donc, ni d’interview d’auteurs, ni même de thème fédérant les publications dans un même numéro – des textes littéraires, et rien d’autre, comme dans une anthologie ; et cela sans restriction de genre : nous publions ainsi des nouvelles, des fragments romanesques, des poèmes, des pièces ou des extraits de pièces de théâtre, des essais, ainsi que des œuvres étrangères en version originale avec leur traduction – tout aussi originale – en français (ainsi, dans le numéro 5, le poète italien Alessandro Ceni, auquel Valérie Brantôme, elle-même poète, prête voix dans notre langue, et le vieux Lucain).

Nous n’avons pas non plus adopté de ligne éditoriale stricte et contraignante. Nous publions des auteurs contemporains (sauf pour les traductions), confirmés ou débutants, connus ou pas. Choisis comment ? Tous les textes reçus sont anonymés, soumis à notre comité de lecture, et donc jugés pour leurs qualités propres, sans influence de noms. Nos préférences vont à des écritures, à la fusion d’un style avec un univers. Ici encore, aucune fixation de notre part sur une quelconque orientation : dans le n° 5, par exemple, il y a un gouffre entre la prose d’un Georges Bonnet et celle d’une Catherine Ysmal, entre celle d’un Fabrice Pataut ou d’un Pierre Vinclair et celle d’un Denis Montebello ou d’un Arnaud Maïsetti, entre la poésie d’un Marcel Migozzi et celle d’un Alessandro Ceni – pour ne pas parler de celle de Lucain, magistralement revigorée, dépoussiérée (je ne parle évidemment pas du texte latin) par la traduction somptueuse que Pierre Troullier en donne en alexandrins – et en poète, si vous me pardonnez ce zeugme[1].

Mais toutes ces expressions, si différentes soient-elles les unes des autres, ont en commun, du moins nous semble-t-il et l’espérons-nous, de relever d’une haute exigence littéraire, que nous essayons de mettre en valeur dans un livre collectif de facture très soignée. Permettez-moi d’y insister, quand bien même cela paraîtrait immodeste : plus qu’un éphémère numéro de revue, un livre – de ceux qu’on garde précieusement dans une bibliothèque.


2 - La description de la revue telle que je l'ai lue sur Facebook parle de publier des œuvres littéraires contemporaines inédites à l'écart de l'édition universitaire, pourquoi ce besoin de se référer à l'Université et de s'en démarquer.

Nous n’avons rien contre l’Université : tous les membres du comité de rédaction en sont issus, et certains y travaillent encore. Nous pensons toutefois que, si la critique universitaire, par les éclairages qu’elle apporte en fonction de son orientation et des époques où elle s’exerce, est évidemment d’une grande utilité pour la pénétration des œuvres, elle ne doit pas prendre le pas sur ces dernières – d’autant que sa complexité actuelle a tendance à en détourner le lecteur qui ne dispose pas toujours des compétences disciplinaires (linguistiques, psychanalytiques, etc.) nécessaires à sa compréhension.

Qui plus est, les revues universitaires ne manquent pas dans le paysage éditorial français, qui complètent, mais en parallèle, une entreprise telle que la nôtre. Quitte à me répéter, L’Arsenal, c’est de la littérature, rien que de la littérature, dégagée de tout ce qui gravite autour. C’est là notre originalité, partagée avec quelques autres revues consœurs – mais peu fréquentes –, et nous souhaitons nous y tenir.


3 – Les textes bien entendu se défendent eux-mêmes et certains auteurs n’ont pas besoin d’être présentés, vous publiez cependant des auteurs quasiment inconnus, je pense en particulier au texte magnifique de Catherine Ysmal, l’absence d’information concernant l’auteur ne vous paraît-elle pas nuire à la lecture du texte ?

Vous touchez là du doigt la polémique ancienne (Sainte-Beuve, Proust…) relative aux rapports entre l’œuvre et son auteur. Si je partage amplement, nécessairement, votre point de vue sur le texte de Catherine Ysmal – dont c’est la première publication de quelque ampleur –, je me demande bien ce que des données biographiques apporteraient à l’appréciation du fragment romanesque que cet auteur nous a soumis ! C’est une question toute rhétorique, à laquelle je crois pouvoir répondre si je me réfère à ma propre expérience d’écrivain : au final, bien peu de choses, ou rien que le texte ne dise déjà dès lors qu’on sait l’interroger.

Laissons donc parler les œuvres plutôt que de céder la parole à leurs auteurs (à quoi bon les déranger – Lucain, du reste, est mort depuis plus de deux mille ans ?). Le lecteur curieux peut toujours se renseigner, s’il le souhaite, sur Internet, cet outil formidable d’investigation : il y trouvera, dans la plupart des cas, les informations qu’il cherche. De notre côté, nous souhaitons avant tout promouvoir des textes, et, ce faisant, susciter l’intérêt d’éditeurs potentiels. C’est en ce sens que nous avons souci de nos auteurs : en les publiant avec rigueur et soin (nous accomplissons avec eux un minutieux travail éditorial, dès lors que leurs textes sont sélectionnés), et en accompagnant leurs publications de notices bio-bibliographiques brèves mais bien suffisantes, suivant en cela notre crédo : la qualité d’une œuvre ne réside pas dans une date et un lieu de naissance, mais dans une écriture où un univers se réfléchit – pour ne pas un peu jouer sur les mots.

 

Revue disponible notamment sur Amazon.fr

 


[1] procédé stylistique consistant à rattacher deux termes sur des plans sémantiques différents ("Enfermé dans sa chambre et dans sa surdité").

 

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