23 ans !





Accueil > LITTERATURE > L’enfance meurtrie de Louis-Ferdinand Céline - Jean-Paul Mugnier

L’enfance meurtrie de Louis-Ferdinand Céline - Jean-Paul Mugnier
par penvins

Jean-Paul Mugnier examine ici une hypothèse que lui suggère sa pratique de thérapeute auprès d'enfants victimes de violences physiques et sexuelles, il n'avance bien sûr aucune preuve - comment le pourrait-il ? - mais il donne suffisamment d'indices pour que son intuition mérite examen.

Comme il le dit lui-même,

les agressions sexuelles dont Ferdinand a été victime et que nous relatons dans cet essai, concernent l'enfant de Mort à Crédit. Rien ne permet d'affirmer qu'elles se soient produites dans la réalité. p 18

La première scène d'abus sexuel sur Ferdinand est décrite dans Mort à Crédit alors que l'enfant - celui du roman - est âgé de moins de six ans, le narrateur précise qu'il se souvient des circonstances.

Elle retrousse son peignoir brusquement, elle me montre toutes ses cuisses, des grosses, son croupion et sa motte poilue, la sauvage ! Avec ses doigts elle fouille dedans... " Tiens mon mignon ! ...Viens mon amour !...Viens me sucer là-dedans !... " Mort à Crédit Folio p 59

suivra une autre scène où Mme Pinaise et son mari le pelotent alors que la mère de Ferdinand ne semble rien voir.

Jean-Paul Mugnier relève chez Ferdinand divers symptômes propres aux enfants abusés :

Le langage cru et les propos orduriers.

Le symptôme est souvent banalisé, pourtant à travers le langage cru dont ils se servent les enfants abusés cherchent à faire passer un double message
- Tenter de faire savoir le mal dont ils sont victimes
- Exprimer l'image qu'ils ont d'eux-mêmes comme des êtres dégoûtants

Et si Céline a environ quarante ans lorsqu'il écrit Mort à Crédit, c'est pour faire le récit de ce qu'il présente comme son enfance, qu'il choisit d'avoir recours à ce vocabulaire outrancier. p 57

L'encoprésie

qui permet de tenir l'autre à distance et qui est aussi symptomatique de la vision que l'enfant abusé a de lui-même

Je gardais la crotte au cul des semaines. Je me rendais compte de l'odeur, je m'écartais un peu des gens. Mort à Crédit Folio p 70

Les masturbations convulsives

Que Céline attribue à Ferdinand tout au long de Mort à Crédit que celui-ci soit enfant -
pas encore pubère - ou adolescent

Les masturbations d'animaux

Il s'agit là encore d'un symptôme spécifique. C'est sur le chien offert par sa grand-mère que Ferdinand se venge de tous les sévices dont il est victime.

J'ai voulu lui faire comme mon père. Je lui foutais des vaches coups de pompes quand on était seuls. Il partait gémir sous un meuble. Il se couchait pour demander pardon. Il faisait
exactement comme moi.
Ca me donnait pas de plaisir de le battre, l'embrasser je préférais ça encore. Je finissais par le peloter. Alors il bandait.
Mort à Crédit Folio p 69

Rage contre la mère

Très souvent les thérapeutes, les éducateurs constatent que ce n'est pas contre son agresseur que l'enfant éprouve la colère la plus intense mais contre sa mère auprès de laquelle il espérait trouver de la protection. p 63

Pourquoi moi

J'avais déjà trop de sales instincts qui me venaient on sait d'où !... Mort à Crédit Folio p 147

Cette question tous les enfants victimes de sévices se la posent. S'ils sont maltraités physiquement, ils pensent que c'est parce qu'ils sont mauvais, s'ils sont victimes d'abus sexuel, ils se diront qu'ils ont été choisis par leur agresseur parce qu'il y avait probablement quelque chose de dégoûtant en eux et que ce dernier l'avait deviné. p 68

Jean-Paul Mugnier rappelle plus loin que l'expérience montre que plus l'enfant dévoile ces actes de façon provocante, plus ce questionnement est intense chez lui, et se demande:

Le même processus est-il à l'oeuvre chez l'écrivain ? Salué presque unanimement pour Voyage, sans doute espérait-il que cette image positive l'emporterait sur celle négative qu'il avait de lui-même à la suite des sévices dont il avait été victime et qu'il s'apprêtait à dévoiler dans son deuxième livre? p 95

et de conclure

Céline avait écrit Mort à crédit trop tôt autour. Après ce livre il était fini. [...] Dès lors il ne lui restait plus qu'à souffrir et voulant bien convaincre ses lecteurs que cette vilénie il en était responsable à retourner la violence contre lui. p 96

ainsi Céline sera-t-il - se voudra-t-il - jusqu'à la f in de sa vie à la fois victime et coupable. Se mettra-t-il dans la posture de l'infâme.

Enfin J-P Mugnier tente de retrouver l'agresseur de Céline, de qui a-t-il pu subir les sévices sexuels étant entendu que les sévices physiques était l'oeuvre de son père. La dernière hypothèse de l'auteur n'est pas la moins intéressante, elle expliquerait la violence de la scène rapportée plus haut et surtout la scène de Mme Pinaise, dans Progrès Céline n'a-t-il pas appelé Mme Punais celle qui semble être un portrait de sa grand-mère, une grand-mère dont il a ensuite pris le prénom, une grand-mère apparemment protectrice mais plus ambiguë qu'il n'y parait. Hypothèse bien sûr mais les argument de J-P Mugnier ne laissent pas indifférent.


Penvins
e-litterature.net©

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions’inscriremot de passe oublié ?