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L’écriture à l’écoute - Henry Bauchau
par Florence Trocmé

bauchau

Actes Sud 2000

 

Voilà un livre très impressionnant. Par son élévation et par son engagement. Il s'agit d'une série d'essais tout à fait complémentaires (pas ici de ramassis de circonstances d'écrits de seconde main) relatant la confrontation d'Henry Bauchau à l'écriture.

Poète, essayiste, romancier, Henry Bauchau n'est en effet pas venu facilement à l'écriture et il décrypte parfaitement les processus inconscients qui l'empêchaient d'accomplir ce qui, il le savait depuis toujours, était sa vocation. Il lui a fallu pour cela deux analyses, dont la première avec un personnage étonnant, dite la Sibylle, dont on découvre au fil du récit qu'il s'agit de Blanche Jouve, épouse de Pierre-Jean Jouve, analysée par Freud ! Mais plutôt que de raconter ses analyses, ce qui est en général fastidieux, Henry Bauchau choisit de suivre les grands personnages "surgis de son inconscient" et qui vont le guider dans sa conquête de son écriture, de sa voix : Genghis Khan et Mao Zedong (essai La Chine intérieure) mais aussi Antigone. Il évoque dans des pages très émouvantes des souvenirs puissants, comme celui d'une vision enfantine déterminante ou ceux d'un père, jugé faible et mou et à qui il donne dans un étonnant récit une sorte de seconde chance. On découvrira aussi un très beau portrait de l'écrivain et homme de radio Jean Amrouche qui joua un rôle déterminant en poussant sans ménagement Bauchau vers ce qui devait être le cœur d'un récit, la mort de sa mère, qu'il n'avait pas le courage d'aborder.

Dans ce livre très dense l'auteur se dévoile sans concessions, articulant sans cesse l'écriture et les forces inconscientes. Ce pourrait bien être aussi une sorte de "lettres à de jeunes écrivains qui cherchent leur voix et leur voie ". Mais attention, amateur de facilité, s'abstenir !

Deux extraits :

"je n'ose pas entrevoir encore – exprimer mon désir d'être écrivain – je doute de ma vocation. Genghis Khan surgi en moi comme parole puissante de l'inconscient affirme à ma place mon droit qui est le droit du rêve. Quel rêve ? Celui de l'imaginaire et de son droit que je puis déjà proférer mais pas encore penser "

Henry Bauchau, in L'écriture à l'écoute, Actes Sud 2000, page 127.

"Qu'est-ce que l'imagination ? se demande Pierre-Jean Jouve : c'est un rapport de liberté avec l'inconscient et un charme jeté sur le monstre. L'imagination profonde est donc un rapport de liberté de notre part consciente avec cette merveilleuse et redoutable instance de la nuit. Pour connaître la liberté, il faut d'abord n'avoir pas peur, devenir résolument soi-même et affronter les luttes inévitables. Le rapport de liberté avec l'inconscient n'est pas un fait acquis, c'est un état où l'on parvient à travers un travail de toute la vie. On y accède par moments quand l'inconscient, se sentant écouté, apporte avec confiance à l'activité consciente ses matériaux, ses richesses, son étendue et aussi ses colères, car sa colère veut dire espérance"

(ibid page 149)

quelques liens

résumé d'un colloque Bauchau à Cerisy :

http://www.ccic-cerisy.asso.fr/bauchau01.html

Florence Trocmé

11/04/2002

 

 

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